Comment traquer les nids de frelons asiatiques grâce à une radio-balise légère en 2026 : l’innovation LOCNEST expliquée

Repérer un nid de frelon asiatique enfoui dans un bois ou en ville n’est plus seulement une affaire de chance.
Avec son système LOCNEST, l’ingénieur toulousain Florent Coletta colle une micro-balise radio (environ le poids d’une abeille, ~0,12 g) sur un frelon asiatique, puis suit le signal grâce à une application sur smartphone. Résultat : localisation rapide et fiable des nids, baisse immédiate de la prédation sur les ruchers, et réduction du nombre de futures fondatrices pour la saison suivante.

Conçue pour les apiculteurs, les professionnels de la désinsectisation et les acteurs de terrain, cette technologie répond à un double enjeu :

• Trouver les nids tôt dans la saison pour protéger les colonies et limiter les pertes de miel.
• Casser la reproduction du frelon asiatique en détruisant les nids avant l’envol massif des fondatrices à l’automne.

Pensé dès le départ comme un outil de terrain, simple et abordable, LOCNEST repose sur :

• une micro-balise radio ultra-légère fixée sur le thorax du frelon,
• une clé SDR (récepteur radio) connectée à un smartphone,
• l’application SDR Pro Track, développée pour guider l’opérateur vers la source du signal.

Dans cet article, ALLO FRELONS revient, à partir de l’interview de Florent Coletta, sur le pourquoi, le comment et les limites actuelles de cette technologie, ainsi que sur ses applications aujourd’hui efficaces et les perspectives pour les apiculteurs amateurs et pros, les entreprises de désinsectisation et les collectivités.

📺 Vidéo : entretien complet avec l’inventeur de Locnest

Interview de Florent Coletta par Guillaume Castagné (ALLO FRELONS), à propos du système Locnest pour la traque des nids de frelons asiatiques.

1. Le problème : prédation massive et nids « invisibles »

Pour les apiculteurs amateurs et professionnels, la situation est connue :

• ruches en mode défense permanente,
• stress chronique des colonies,
• baisse de récolte de miel,
• parfois mortalité de l’essaim.

Les entreprises de désinsectisation et les collectivités font le même constat :
on reçoit de plus en plus d’appels pour des ruchers assiégés par le frelon asiatique, mais le nid reste introuvable. On à aussi des problèmes de sécurité liés à la présence de nids non détectés et dérangés dans la saison estivale (attaques qui peuvent être mortelles).

Deux réalités compliquent la lutte :

1. Les nids sont souvent cachés
   • Environnement boisé : nids masqués par le feuillage, parfois à quelques dizaines de mètres seulement, mais totalement invisibles à l’œil nu.
   • Milieu urbain : nids en cime d’arbres, en toiture, dans des zones privées ou difficiles d’accès.
2. Tous les nids proches ne sont pas forcément responsables de la prédation
   Dans l’expérience de Florent :
   • un nid à ~50 m d’un rucher n’engendrait aucune prédation notable,
   • un autre nid, situé à environ 600–700 m, était en réalité le principal foyer de frelons prédateurs, probablement faute de ressources alimentaires à proximité de son implantation initiale.

👉 Conclusion pour le terrain :
Se contenter de détruire « le nid qu’on voit » n’est pas une garantie.
Il faut identifier précisément le nid qui prédate effectivement le rucher.

2. L’idée : suivre le frelon asiatique jusqu’à son nid

En partant du terrain et d’un « simple » défi technique, Florent Coletta a posé une question très concrète :

« Si je pouvais suivre un frelon asiatique, pourquoi ne pas le laisser me montrer lui-même où est son nid ? »

2.1. De l’aéronautique à la radio-balise

Ancien directeur d’usine dans l’aéronautique à Toulouse, formé au traitement du signal et à l’électronique, Florent dispose de trois atouts clés :

• une culture industrielle : produire simple, robuste et peu cher,
• des compétences en radiofréquences et traitement du signal,
• une vraie sensibilité terrain : très vite en contact avec les associations d’apiculteurs, il mesure l’ampleur du problème frelon asiatique.

Au départ, ce n’était qu’un défi d’ingénieur.
Quand il réalise qu’aucun système opérationnel de ce type n’existe, il décide de développer sa propre solution.

3. Le système LOCNEST : comment ça marche ?

3.1. Une micro-balise radio de ~0,12 g

Le cœur du système, ce sont les petites balises radio :

• Poids : environ 0,12 g, soit l’ordre de grandeur du poids d’une abeille.
• Composants : un émetteur radio miniaturisé et une micro-batterie.
• Objectif : être suffisamment léger pour que le frelon puisse décoller et voler « normalement » jusqu’à son nid.

Le premier défi a été de faire accepter la charge au frelon :

• forme, taille, point de collage,
• système d’accroche,
• type de colle,
• compatibilité avec les conditions météo (condensation, froid…).

Après plus de 300 essais sur frelons la première année, le système finit par fonctionner :
le frelon décolle avec la balise, rentre au nid, et reprend ensuite une activité normale.

3.2. Balisage des frelons « habitués » au rucher

Pour s’assurer que le frelon balisé revienne bien au nid responsable de la prédation :

1. On attire les frelons asiatiques avec un petit pot de miel ou un couvercle rempli de nourriture devant le rucher.
2. Les frelons établissent une routine d’allers-retours entre le rucher et leur nid.
3. On capture ces frelons « réguliers » dans un petit bocal.
4. On les place dans un dispositif de contention (cylindre grillagé + piston) permettant de présenter correctement le thorax.
5. On colle la balise sur le thorax, on vérifie le collage, puis on relâche le frelon. C’est l’opération la plus délicate.

Ces frelons « habitués » au rucher sont les meilleurs candidats, car ils connaissent déjà l’itinéraire vers le nid.

3.3. L’application SDR Pro Track : suivre le signal en temps réel

Pour éviter de développer un récepteur propriétaire coûteux, Florent s’appuie sur trois éléments :

• une clé SDR (Software Defined Radio) : elle numérise le signal radio émis par la balise,
• un smartphone Android,
• l’application SDR Pro Track, développée avec des briques modernes (C++, JS, Python, Kotlin…).

Fonctionnement pour l’utilisateur :

1. La clé SDR est branchée au téléphone.
2. L’application affiche la force du signal reçu.
3. L’opérateur se déplace en suivant la direction où le signal est le plus fort.
4. En affinant progressivement la trajectoire, on finit par localiser le nid.

En conditions idéales (espace libre), les balises actuelles offrent 3 à 4 km de portée radio.
En milieu urbain, la portée pratique diminue (murs, bâtiments, contraintes de circulation), mais reste suffisante pour retrouver des nids situés à quelques centaines de mètres.

4. Pourquoi l’anticipation est cruciale : deux bénéfices majeurs

Détecter un nid de frelon asiatique précocement dans la saison présente deux avantages essentiels :

1. Soulager immédiatement la pression sur le rucher
   • moins de frelons en vol stationnaire,
   • baisse du stress des colonies,
   • amélioration de la récolte de miel.
2. Casser la reproduction avant l’envol des fondatrices
   • avant octobre, le nid n’a pas encore libéré toutes les futures reines,
   • en détruisant le nid tôt, on évite la dispersion de fondatrices sur la zone,
   • on réduit la pression pour la saison suivante.

5. Terrain : ce que LOCNEST révèle sur le comportement des frelons

Grâce au système de traque, plusieurs points se confirment ou se précisent.

5.1. Distance entre nid et rucher : souvent plus loin que ce qu’on croyait

Pendant longtemps, on pensait que les nids responsables de la prédation se situaient à 100–200 m des ruchers.
Les premières chasses radio montrent :

• des nids à 1 km – 1,5 km, parfois jusqu’à près de 2 km,
• certains nids très proches (50 m) sans impact notable sur un rucher donné,
• d’autres nids, plus éloignés, responsables de la majorité des attaques.

Cela confirme ce que beaucoup de pros constatent sur le terrain :
le rayon d’action réel des frelons est souvent de l’ordre de plusieurs centaines de mètres à plus d’un kilomètre, selon les ressources disponibles (fruits, eau, ruchers voisins, etc.).

5.2. Outil de détection… et outil d’étude

Au-delà de la seule destruction de nids, Locknest devient aussi un outil d’étude comportementale :

• temps de trajet nid ↔ rucher,
• distances réellement parcourues,
• adaptation à des environnements différents (vignes, vergers, zone périurbaine, pleine ville).

Des équipes comme celles de l’INRAE Avignon commencent à utiliser ces systèmes pour affiner leurs connaissances sur le frelon asiatique et tester différentes méthodes de perturbation (déplacement du frelon, observation du retour, etc.).

6. Limites actuelles et axes d’amélioration

Pour être utile au quotidien à des apiculteurs, des bénévoles ou des entreprises de désinsectisation, un tel système doit répondre à plusieurs contraintes.

6.1. Temps, batterie et ergonomie

Quelques points techniques clés :

• Autonomie actuelle : environ 3 h d’émission radio, ce qui est cohérent avec une session de chasse.
• Objectifs futurs :
  • des balises encore plus légères,
  • une puissance d’émission plus élevée pour mieux traverser les obstacles, même si l’autonomie est réduite pour jouer sur le poids embarqué,
  • des procédures de collage standardisées (type de colle, gabarits, outils) pour limiter les ratés (froid, condensation, tremblements, etc.).

La priorité de Florent Coletta aujourd’hui :

• produire suffisamment de balises,
• renforcer la formation des utilisateurs,
• simplifier chaque étape pour que la méthode soit reproductible même par des personnes peu techniciennes.

6.2. Milieu urbain : contraintes et avantages

En ville :

• la portée radio est réduite (bâtiments, murs, impossibilité de se déplacer en ligne droite comme le frelon),
• l’opérateur doit respecter la réglementation et les accès (propriétés privées, immeubles, voies ferrées…).

Mais il existe aussi des avantages :

• le nombre d’arbres et de structures potentielles est souvent plus limité qu’en forêt,
• beaucoup de nids sont trouvés en arbres de ville ou en toiture, donc plus faciles à cibler une fois la zone générale identifiée.

7. Et le frelon européen, les drones, la concurrence… ?

7.1. Adaptation au frelon européen

Techniquement, le système peut être adapté au frelon européen :

• l’insecte est plus massif, donc capable de porter la balise,
• la problématique de sécurité autour des habitations (nids proches des habitations, autour des éclairages nocturnes) pourrait bénéficier de ce type de traçage.

Pour l’instant, l’effort de développement est concentré sur le frelon asiatique, compte tenu de son impact sur les ruchers. La destruction du frelon européen ne doit pas être systématique, mais étudiée au cas par cas en fonction des critères de sécurisation.

7.2. Drones et autres solutions

D’autres pistes sont déjà explorées :

• drones équipés de récepteurs : utiles en recherche, mais
  • coût très élevé,
  • formation obligatoire de télépilote,
  • contraintes réglementaires très fortes,
  • peu réalistes pour un déploiement massif « de tous les jours ».
• concurrents étrangers (par ex. un système néerlandais) :
  • balises visuellement proches mais fonctionnant sur des fréquences plus élevées,
  • portée plus courte, peut-être plus adaptée à des contextes très urbains, au prix d’une multiplication des chasseurs nécessaires.

8. Quel rôle pour l’IA dans tout ça ?

À ce stade, l’intelligence artificielle est surtout un outil d’aide au développement logiciel (génération de code, structures, optimisation).
Mais plusieurs pistes se dessinent :

• analyse des traces de chasse :
  • enregistrer les trajets des opérateurs,
  • corréler avec la position finale des nids,
  • entraîner des modèles de machine learning pour suggérer des trajectoires optimisées.
• amélioration du guidage en temps réel :
  à terme, utiliser l’historique des chasses pour proposer des recommandations contextuelles :
  « dans ce type d’environnement, avec ce profil de signal, la probabilité est forte que le nid soit dans tel type de structure ».

Ces évolutions restent conditionnées au respect des règles de protection des données (RGPD) et au consentement des utilisateurs qui partageraient leurs données de chasse.

9. Pour qui, comment, et à quelles conditions ?

9.1. Publics concernés

Le système LOCNEST vise en priorité :

• les apiculteurs amateurs et professionnels qui souhaitent une solution proactive pour protéger leurs ruchers,
• les entreprises de désinsectisation qui veulent proposer des prestations de recherche de nids de frelon asiatique à haute valeur ajoutée,
• les groupements sanitaires apicoles, syndicats et collectivités qui souhaitent structurer une lutte localisée et raisonnée contre le frelon asiatique.

9.2. Philosophie de prix et d’accessibilité

Florent Coletta a conçu LOCNEST d’abord pour le terrain, pas pour des laboratoires disposant de budgets illimités :

• choix de briques technologiques existantes (smartphone, clé SDR),
• volonté de maintenir un coût contenu, accessible à des structures locales,
• priorité à la robustesse et à la simplicité d’usage, plutôt qu’à un gadget technologique hors de prix.

Ce positionnement en fait un outil particulièrement intéressant pour :

• les apiculteurs organisés en groupes,
• les GDSA/GDS,
• les entreprises de désinsectisation qui cherchent un avantage différenciant.

10. Foire aux questions (FAQ)

11. Et maintenant ?

La technologie LOCNEST arrive à un stade où :

• les frelons peuvent décoller de façon fiable avec la balise,
• les nids sont trouvés de plus en plus régulièrement sur le terrain,
• des équipes (GDSA, désinsectiseurs, apiculteurs) commencent à s’approprier la méthode.

Les prochains défis seront :

• de généraliser la formation à l’usage de la balise et de l’application,
• de standardiser les protocoles (collage, capture, sécurité, restitution des données),
• d’améliorer la portée en milieu urbain et la facilité d’utilisation pour tous.

Pour aller plus loin

• Découvrir le système LOCNEST et l’application SDR Pro Track (liens dans le corps de l’article).
• Contacter ALLO FRELONS pour en savoir plus sur les solutions de lutte écoresponsable contre le frelon asiatique et la mise en relation avec les professionnels équipés.

La radio-balise type Locknest ouvre une voie nouvelle :
faire du frelon asiatique lui-même le guide vers son nid, pour une lutte plus ciblée, plus efficace et plus respectueuse des écosystèmes.

Dernière modification le novembre 22, 2025 par Castagné Guillaume